Tranches de retraité… Charly Monnet

Après les anecdotes contées par l'adjudant Christian Dischinger dans notre édition du mois de mars, place à l'inspecteur Charly Monnet qui nous fait le plaisir de partager quelques anecdotes insolites vécues au cours de sa carrière au sein de la Police cantonale valaisanne. Des prémices de l'ADN à l'ouverture des premiers salons de massage en Valais, la mémoire vive de la Police judiciaire des années 1980 de l'inspecteur Monnet ne risque pas de faiblir. Rencontre avec cet ancien gardien de prison devenu… inspecteur !
Charly Monnet

C’est en 1980 que Charly Monnet quitte la prison de Champ-Dollon où il n’était pas détenu, mais y officiait comme « maton ». Il rejoint les rangs de la Police cantonale valaisanne et y effectue son école d’aspirant.

Ses premiers pas de gendarme au poste de police de Nendaz :

Le contact avec la population, était déjà excellent à l’époque. En ce temps-là, les agents de la Police cantonale contrôlaient la qualité du lait dans les écuries, prélevaient l’eau dans les piscines des immeubles, vérifiaient les constructions, délivraient les plaques de vélo, les permis de chasse etc….

Charly a passé 5 années dans ce poste de montagne. Il se souvient d’ailleurs d’un évènement dramatique et qu’il l’a particulièrement marqué :

Son supérieur de l’époque était tombé nez-à-nez avec celui qu’on surnommait à l’époque le roi de l’évasion Jakob Schmidt* et son complice alors qu’ils cambriolaient les locaux du poste de police de Nendaz. Le malfrat n’a pas hésité à ouvrir le feu blessant au coude le chef de poste.

La voleur suisse-allemand n’avait pas fini de donner du fil à retordre aux policiers, lors d’une patrouille de nuit dans la région de Siviez, Charly alors accompagné d’un apprenti gendarme fait une bien curieuse découverte. Leur attention fut attirée par un véhicule de marque Audi, de couleur blanche et portant des plaques soleuroises, stationné sur le parking d’un immeuble. Au terme de quelques vérifications d’usage, il s’est avéré que le véhicule en question n’était pas signalé volé. Soucieux de toutefois tirer au clair la présence suspecte de cette auto, les gendarmes effectuent une rapide inspection des commerces avoisinants mais ne remarquent rien d’anormal.

Ce n’est que le lendemain matin que la police est informée qu’une agence immobilière a été cambriolée. Le coffre-fort avait été découpé au chalumeau. Quelques jours plus tard, lors de son arrestation, le complice de Jakob Schmidt a déclaré qu’ils avaient entendu les agents. Ils s’étaient alors cachés sous une bâche. Les cambrioleurs avaient même été jusqu’à remplacer le cylindre de la porte d’entrée du commerce avant de s’y enfermer pour commettre leur méfait. Il déclara également qu’ils étaient armés et que Schmidt avait lui-même fabriqué les plaques d’immatriculation qui équipaient la fameuse Audi…

* prénom et nom d'emprunt

Les débuts de l’ADN et l’efficacité d’un portrait-robot :

Charly raconte qu’un « vieux cheval » de retour avait décidé avec son complice de forcer le coffre-fort d’un restaurant d’altitude. Après une longue marche dans la neige, ceux-ci sont arrivés sur les lieux et ont ouvert le coffre par effraction.

Fiché, l’auteur a pu être identifié grâce à son ADN laissé sur une bouteille bue sur place.

Lors de son audition, il se moque de son complice arguant que celui-ci regardait trop de films. En effet, son acolyte lui avait pourtant conseillé de ne pas laisser de mégots de cigarettes sur place, de ne pas boire, car il avait vu dans une série télévisée que la police, aurait pu ainsi les identifier.  

Les enquêteurs se sont toutefois bien gardés de lui communiquer de quelle manière il avait été confondu et qu’il avait n’avait pas vu une importante somme d’argent dans une enveloppe collée à la porte intérieure du coffre-fort.

L’inspecteur Monnet se remémore une autre enquête, un commerçant avait été victime d’un brigandage dans sa résidence secondaire. Les auteurs l’avaient frappé, attaché à une balustrade et avaient fini par obtenir le code du coffre-fort où une arme et des objets de valeurs ont été dérobés.

Ce même commerçant avait déjà été victime d’un cambriolage à son domicile principal une semaine auparavant et une empreinte digitale avait été relevée par les spécialistes de la section d’identité judiciaire.

Convoqué dans les bureaux de « la secrète », la victime avait pu dresser un portrait-robot de l’auteur principal qui n’était pas cagoulé. Une fois les derniers traits du dessin peaufinés, un collègue frappa à la porte et brandit la photographie du cambrioleur identifié grâce à l’empreinte digitale. L’invraisemblable ressemblance entre le portrait-robot et cette photo n’a pas manqué de surprendre au plus haut point notre inspecteur qui déclara ne jamais avoir vu cela de toute sa carrière.

Le malfrat a ainsi pu être confondu pour les deux affaires.

Le fort en français :

C’est le sourire aux lèvres que Charly tient à nous partager une anecdote s’étant déroulée lors de l’une de ses nombreuses enquêtes. En qualité d’inspecteur, notre invité était chargé d’interroger un petit cambrioleur en herbe qui avait commis plusieurs larcins dans différents négoces, en compagnie de complices.

Lors de son audition, le policier s’intéresse à la situation personnelle du jeune voyou, afin de savoir si tout se passe bien tant à la maison qu’à l’école. Le jeune répond que tout se passait bien pour lui, que l’école c’est cool, même s’il rencontre toutefois des difficultés en français. Lors de l’interrogatoire, le garçon décrit avec entrain tous les méfaits de ses camarades :

–  » Ils ont repéré les lieux, ils ont défoncé la porte, ils ont emporté de la marchandise, ils ont trouvé de l’argent. »

Ce n’était pas ce que notre enquêteur souhaite entendre… Il veut connaître l’implication de ce jeune dans ces cambriolages, il lui demande :

– » Ils, ils et ils, d’accord mais toi, t’étais invisible ou quoi ? » Et la réponse fut sans appel :

–  » Ah, vous voyez M’sieur, je vous avais dit que j’avais des problèmes en français. »

Le mariage :

Charly Monnet, ancien gardien de prison s’est occupé d’un cambrioleur et braqueur récidiviste. L’individu n’était pas encore en exécution de peine et risquait plusieurs années de prison. Le Juge d’instruction de l’époque avait donné son assentiment pour qu’il puisse se marier. Le prévenu avait donné sa parole sur le fait qu’il ne tenterait pas de fausser compagnie aux agents de police (à l’époque les vrais voleurs tenaient leurs promesses). Le futur jeune époux a été accompagné devant l’officier d’état civil et la fête s’est poursuivie au domicile de son épouse jusqu’à l’heure fixée.

Bon princes, les policiers ont laissé les nouveaux époux seuls dans leur chambre nuptiale…. Puis, ils ont reconduit le braqueur à la prison des Iles de Sion, sans encombre. 

Salons de massage :

En 1988, une dame contacte l’inspecteur Monnet par téléphone afin de lui demander quelles démarches entreprendre pour ouvrir un salon de massage. Charly se renseigne alors auprès de sa hiérarchie et la réponse reçue par un Officier d’Etat-major est sans appel : « Aucune démarche possible ! » Sans étayer pour autant donner davantage d’arguments valables, si ce n’est éthique.

Comme aucune base légale ne s’opposait à son installation, une semaine plus tard, le policier souhaitait à cette dame la bienvenue en Valais. Ce salon a été durant quelques mois l’attraction d’un quartier de la ville car son entrée se situait en face d’un café et les clients se régalaient de cette nouvelle attraction.

Vingt années plus tard on recensait une trentaine de salons de massage dans le Valais central.

En conclusion, notre invité est satisfait de l’entier de sa carrière qui lui a permis de découvrir des lieux, des domaines ainsi que des événements particuliers, comme par exemple, le schisme d’Ecône, ou la réunion de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) à Genève. Sans compter les nombreuses commissions rogatoires inoubliables qui l’ont conduit jusque dans les favelas de Rio de Janeiro où, en compagnie de collègues, il a passé des moments incroyables notamment avec les membres du BOPE (section d’intervention de la ville – chargés notamment de pacifier les favelas).

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